Un passionné aux rênes des clubs de poney de Saigon et d’Hanoi

Après avoir fait carrière dans l’agriculture et le commerce, Amaury Le Blan est revenu à son amour de jeunesse : l’équitation. Il rachète le poney club de Saigon en 2007 et ouvre un deuxième club hippique à Hanoi en 2018.

« Je suis né dans un ancien zoo à Lille. » C’est par ce clin d’œil humoristique du destin que commence l’odyssée du Nordiste, installé au Vietnam depuis 26 ans. Amaury grandit dans le parc d’attraction de ses parents, qui l’initient à l’équitation dès l’âge de trois ans. Au terme d’une enfance rythmée par la passion des chevaux et par les concours hippiques, Amaury vend sa jument et part étudier l’agriculture en Angleterre. De retour en France pour son service militaire, qu’il effectue au sein d’un régiment de cavalerie, il repart peu après, en Australie cette fois, pour travailler dans l’élevage de moutons et le commerce de la laine. « J’avais déjà le virus de l’expatriation, un virus que j’ai gardé pour toujours. » Le 4 février 1994, jour de la levée de l’embargo américain sur le Vietnam, Amaury pose ses valises à Saigon. Une décennie plus tard, alors qu’il travaille dans l’import-export, un coup du hasard le remet en selle.

Qu’est-ce qui vous a amené à racheter le Poney Club de Saigon en 2007 ?

En 2003, j’ai reçu un appel d’une amie de la chorale internationale. Elle m’invitait à un barbecue au Poney Club de Saigon. J’y suis allé et j’ai vu trois filles qui essayaient de se débrouiller avec leur poney. J’ai fait l’erreur de rentrer dans la carrière pour les aider. À cet instant, une main s’est posée sur mon épaule. C’était la directrice du club. Elle m’a dit : « On a besoin de moniteurs. » Je ne pouvais pas m’engager parce que j’avais déjà un travail, mais elle a beaucoup insisté. J’ai accepté d’entraîner les meilleurs élèves du club au saut d’obstacle le dimanche matin. Après mon départ de la société Franco-Pacific en 2006, je me suis occupé de plus en plus de classes. Un an plus tard,  j’ai fait une étude et je me suis aperçu que le club était viable. Je l’ai racheté. Le club de Saigon compte désormais une vingtaine de poneys et 125 élèves. En 2018, mon épouse et moi avons ouvert un autre club de poney à Hanoi. Il est situé à côté d’une rivière, ce qui permet de faire de très bonnes balades.

Quelles activités proposez-vous ?

Les reprises sont le cœur de notre activité. Ce sont des cours d’environ 50 minutes qui réunissent entre un et six élèves et qui sont donnés tous les jours en français, en anglais et en vietnamien. Nous organisons également des compétitions hippiques, des tours de poney, des anniversaires et des locations de poneys. J’ai déjà mis un poney dans un ascenseur et ça s’est très bien passé. Lors des vacances scolaires, nous organisons des stages d’équitation pendant lesquels les élèves sont initiés à l’hippologie. Ils apprennent à reconnaître les parties du cheval, à le brosser, à lui mettre le filet et la selle. Ils montent ensuite les chevaux pendant 50 minutes et les douchent à la fin de la reprise.

À qui s’adressent les reprises ?

C’est un club de poney donc 95 % des membres sont des enfants. La clientèle est à 90 % étrangère car l’équitation est un sport nouveau ici. Les quelques élèves vietnamiens que nous avons sont d’excellents cavaliers parce qu’ils ont un sens inné de l’équilibre grâce à la moto.

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Quelles sont les qualités nécessaires pour gérer un club hippique au Vietnam ?

Il faut avant tout être passionné de chevaux et aimer enseigner aux enfants. Il faut aussi du courage et de la persévérance, surtout que ce club s’adresse principalement au marché de niche des expatriés. L’amour du pays, pour moi, c’est ce qui fait qu’un étranger va rester ou non, mais en ce qui me concerne, je suis tombé dans la marmite. Enfin, il faut savoir tout faire : gestion, dressage, enseignement, relations publiques, infirmerie, etc.

Comment vous définiriez-vous ?

Je suis quelqu’un de passionné et d’entêté. J’aime ce métier. Tous les matins, je suis là à 7h30 pour m’occuper des chevaux. C’est calme et le soleil éclaire le club d’une lumière magnifique. Je me sens libre. Sauf qu’il y a quand même quelque chose de pire qu’un patron : c’est la finance. Elle est intraitable. Pour nourrir les chevaux, on achète chaque jour 200 kilos d’herbe au zoo de Saigon et des granulés à une usine du coin.

Avez-vous rencontré des difficultés depuis la création du club de Saigon ? Lesquelles ?

J’ai eu des petites catastrophes, oui ! En octobre 2008, j’avais 18 poneys et j’en ai perdu neuf en trois jours à cause d’un empoisonnement par l’herbe. Soit tu dis « allez basta ! », soit tu reçois des appels d’enfants qui te disent « je veux continuer ! », et tu continues avec eux. En 2012, la veille d’une journée portes ouvertes, le bar a brûlé. Une autre fois, les écuries se sont écroulées.

Quels sont vos projets ? 

J’aimerais augmenter le nombre total d’élèves et accueillir davantage d’élèves vietnamiens. Je souhaite aussi développer l’activité compétition, en organisant par exemple des concours de saut d’obstacle avec les clubs des pays voisins. Pour le moment, il n’existe pas de fédération d’équitation au Vietnam, mais dans un avenir proche, le Vietnam organisera probablement les Jeux olympiques d’Asie du Sud-Est. Le Vietnam devra alors créer sa propre fédération pour accueillir les fédérations internationales d’équitation.

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